mercredi 4 juin 2008

Colomban Vitoux : Deuxième norme de Maître International


Colomban se rapproche du titre en obtenant sa deuxième norme de MI lors de la Mitropa Cup qui se déroulait du 25 mai au 3 juin 2008.

Depuis quelques temps, ce jeune joueur ne cesse de progresser :
Vainqueur de l'accession au championnat de France d'Aix les Bains en 2007, il jouera le National B au championnat de France à Pau en Août 2008.

Colomban a réalisé sa première norme de maître international à Vandoeuvre.
A quand la dernière norme de MI pour Colomban, son classement étant à 2445, celle-ci sera synonyme de l'obtention immédiate du titre de Maître International.
INTERVIEW DE COLOMBAN :

Peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas ?

J’ai maintenant 22 ans (04/11/1985), et je joue depuis tout petit dans le modeste mais fabuleux club de l’Echiquier Haut-Alpin de Gap (Nationale 3). Après avoir fait toute ma scolarité à Gap (de la maternelle jusqu’en classe prépa), j’étudie depuis quelques années à Lyon en école de commerce (EM Lyon). Après un dernier échange universitaire en Espagne, je devrais commencer à bosser en 2009, sûrement dans le secteur financier.

Au niveau échiquéen, je viens d’enchaîner une très belle année qui m’a fait prendre une bonne centaine de points (Elo actuel : 2445). Depuis que je joue aux échecs, j’ai eu une progression régulière mais assez lente comparé à d’autres (Mazé, Cornette, Libiszewski…), ce qui explique que j’arrive à ce niveau alors que personne ne me connait. Par exemple j’ai attendu un certain temps avant d’atteindre les championnats de France Jeunes (première qualification en Benjamins), et après je n’y ai jamais brillé. Mon palmarès avant 2007 ressemble plus à celui d’un éternel espoir local qu’à celui d’un Maître International…

A quel tournoi as-tu réalisé ta 1ère norme de MI ? Quel résultat avais tu fais ?

Après trois bons tournois fin 2007 où il ne me manquait pas grand chose (l’Accession à Aix-les-Bains en août, Etang-Salé à La Réunion en octobre, et Lyon en novembre), j’ai réalisé ma première norme entre Noël et jour de l’An au très sympa tournoi de Vandoeuvre. Paradoxalement, j’avais perdu contre deux 2200, mais battu trois MI pour arracher la norme et une belle place. C’est un peu le même type de scénario que celui que je viens de connaître en Sardaigne à la Mitropa Cup, où j’ai battu plusieurs forts MI mais déconné contre des joueurs inférieurs sur le papier. Question de style de jeu je suppose…

Tu viens d’obtenir ta 2e norme, quels tournois comptes-tu faire pour réaliser ta 3e norme, synonyme de titre ?

Comme diraient les joueurs de poker je suis un peu « en rush » en ce moment, et je suis le premier surpris par mes bonnes perfs actuelles. Tous mes derniers tournois se sont super bien passés, donc pour l’instant j’en suis encore à les savourer plutôt qu’à monter un planning pour la dernière norme.
Comme beaucoup de joueurs je pense, j’attends avant tout d’un tournoi que le cadre et l’ambiance soit sympas. Après le résultat c’est la cerise sur le gâteau (ou le poil dans la soupe…). Il y a plein de tournois que j’aimerais faire, on verra bien où ça tombera. En fait à la base j’étais clairement plus préoccupé pour la barre des 2400, qui me semblait une montagne (comme l’étaient avant les 2300, 2200...). Depuis que j’ai passé cette barrière psychologique je ne m’inquiète plus trop, les normes viendront un jour ou l’autre, et je dois dire qu’actuellement elles s’enfilent comme des perles…

En fait, aujourd’hui je me demande plutôt si je dois viser les 2500, ou bien me dire qu’en tant qu’amateur le titre de MI est déjà la plus belle des récompenses. Mes derniers résultats sont encourageants, mais je sais bien que ça peut aller vite dans les deux sens et c’est sûrement la première fois de ma vie que je me sens surévalué. Les 50 points qui me séparent des GM me paraissent énormes, d’ailleurs je n’ai jamais battu de GM ce qui est rarissime à ce niveau. Mes prochains tournois vont être décisifs pour décider si je me relâche ou si j’essaie de grimper encore, ce qui nécessite de rester un peu « sous tension » avant et pendant chaque tournoi.

As-tu un entraîneur ?

Je n’ai jamais eu d’entraineur de niveau élevé, et j’avoue que ça ne me déplait pas de gérer moi-même ma préparation. Le principal apport que je pourrais espérer d’un joueur de haut niveau serait dans l’analyse stratégique des positions et en particulier de mes parties, où je pense avoir encore beaucoup à apprendre. Et peut-être aussi dans l’expérience des parties et des tournois de haut niveau.

Jusque là le seul prof d’échecs que j’ai eu tournait autour de 1800, et je lui suis encore très reconnaissant de m’avoir transmis sa passion et sa vision simple du jeu. Le fait de recevoir un enseignement amateur des échecs permet de garder du recul, et évite selon moi de s’enflammer et d’exploser en route (pas mal de joueurs prometteurs perdent la flamme et arrêtent brutalement). J’ai aussi reçu depuis mes débuts un soutien de plus en plus fort de mes collègues de club, et j’ai presque une équipe de supporters/secondants/managers derrière moi (virtuellement ou réellement) à chaque tournoi !

Peux-tu nous donner un aperçu de ta méthode de travail ?

Le temps que je consacre aux échecs est très variable selon les périodes, en fonction des tournois qui arrivent et du temps que me laissent mes études (cours, stages, échanges, vacances…). Depuis quelques mois je joue très peu, et ça ne devrait pas s’arranger avec l’entrée dans la vie professionnelle. Par contre, j’essaie d’être assez organisé pour ne pas bosser dans le vide : j’ai une base spécifique et assez carrée pour mes préparations, une pour mes parties (analysées), je note à chaque fois que je veux travailler quelque chose jusqu’à ce que ce soit fait, j’ai quasiment arrêté de jouer sur internet (je pourrais y passer des heures)…

Au quotidien j’essaie au minimum de prendre un peu de temps pour suivre les parties des forts joueurs. Après, suivant le temps disponible je peux bosser quelques heures par semaine mes ouvertures, quasi intégralement avec Chessbase. Depuis 2-3 ans j’ai plus ou moins fait le tour de mon répertoire, donc ces derniers temps je préfère potasser un bouquin, résoudre quelques études de temps en temps, etc.

Je reprends généralement les blitz un peu avant chaque tournoi pour me remettre en jambe et tester mes ouvertures, et j’entretiens les méninges avec des matchs par équipe et quelques rapides de temps en temps. A part ça, avant les compétitions j’essaie de peaufiner mes prépas si besoin, pour ne pas avoir à le faire pendant.
Mais encore une fois tout cela est très variable, et j’ai obtenu le meilleur résultat de ma carrière (Accession 2007) au retour d’un mois de voyage en Inde loin de tout ça, et le deuxième meilleur en vacances familiales à La Réunion.

Pendant le tournoi je me prépare généralement une petite heure par partie, suivant le répertoire de mon adversaire. En ce qui me concerne je joue quasiment que des sous-lignes, mais avec des prépas assez poussées sur chacune. Donc je regarde avant la partie celle ou celles que j’ai choisies, ce qui m’évite de prendre des heures pour étudier une ligne puisque je n’ai qu’à relire mon fichier. Le soir je regarde parfois la partie du jour, mais en général j’essaie surtout de me sortir la tête des échecs.

Par contre, après chaque tournoi j’analyse toutes mes parties sans exception, ce qui me prend pas mal de temps (parfois plusieurs heures sur une partie). Ça peut paraître un peu ingrat mais je pense que travailler sur ses propres parties après avoir longtemps réfléchi dessus devant l’échiquier est le meilleur moyen de faire rentrer les idées, et les erreurs qu’on a faites.

Comment gères-tu le stress pendant un tournoi ?

Honnêtement je ne sais pas trop quoi te dire, car j’ai été assez peu confronté à des situations de gros stress jusqu’à maintenant (j’aurais préféré en avoir l’occasion…).
En principe j’essaie juste de rien changer et de m’aérer l’esprit pendant chaque tournoi, mais c’est vrai que quand on est pris par l’enjeu on peut avoir du mal à relever la tête du guidon… Souvent j’ai un peu voire beaucoup de pression avant la partie, mais ça passe quand je commence à jouer, à la sortie de l’ouverture en général.

Quels conseils peux-tu donner à des joueurs qui souhaitent progresser ?

Je peux me tromper, mais je pense que n’importe quel jeune peut atteindre 2000 voire plus simplement en jouant régulièrement (et en étant un peu patient). On n’arrive pas à 2400 en 2 ans, ni même en 5 ans. Après il faut faire des choix, et pour progresser il n’y a pas vraiment de mystère : il faut identifier ses points faibles et les travailler. Après, il est vrai que les périodes où j’ai le plus progressé ne sont pas nécessairement celles où j’ai le plus joué et travaillé, donc encore une fois il faut être patient et ça finira par payer.

Grosso modo les ouvertures se travaillent avec l’ordi ou des bouquins, la tactique en faisant des exercices ou études, la stratégie en jouant des parties longues et en lisant des bouquins sur tel ou tel aspect, les finales avec des bouquins… Par exemple, je sais que mon gros point faible est sur la stratégie, et je vais m’essayer à des ouvertures moins ouvertes que 1.e4 pour renforcer ma compréhension du jeu (quitte à perdre quelques points au début).

Enfin, un point qui je pense me distingue de pas mal d’autres joueurs est que je joue relativement peu, donc je profite à 200% de chaque tournoi, j’ai la « gnaque » à chaque partie (peu de nulles rapides).
La « gestion de tournoi », ça va bien quand il y a beaucoup d’enjeu, mais sinon... Jouer, préparer et analyser des parties intéressantes est selon moi essentiel à la progression, beaucoup plus que des séances de blitz.

Félicitations pour ton nouveau blog que j’ajoute immédiatement dans mes favoris. Longue vie à l’Amazone Blanche ! :-)
Merci beaucoup Colomban, le blog de l'Amazone Blanche te souhaite une bonne continuation échiquéenne et à bientôt car nous suivrons tes résultats :-) .

1 commentaire:

Aude a dit…

Ca fait du boulot toutes ces interviews ! :)
En tout cas ce sera sans doute très intéressant.